Maître et servante !

dimanche-des-meres

Grâce à une recommandation sur Facebook de Gaëlle Josse, j’ai découvert avec bonheur ce court roman de Graham Swift.

Un très bon moment de lecture que ces pages qui allient le suranné au moderne, la sensualité  d’une liaison déclinante lors d’un mois de mars éclatant de soleil, les rapports subtils entre  la Grande Bourgeoisie anglaise et sa domesticité.

Le “dimanche des mères” est une coutume aristocratique qui offre aux domestiques une journée par an pour visiter leur mère. La jeune Jane est orpheline aussi ce dimanche particulier serait-il pour elle l’occasion de se promener et de lire en profitant de cette journée radieuse qui illumine cette région du Sud de l’Angleterre. Mais il en ira tout autrement car son amant, un jeune homme de très bonne famille lui propose de le retrouver dans sa grande demeure, ses parents étant occupés à un déjeuner chez les parents de sa fiancée. D’ailleurs il doit rejoindre celle-ci pour un tête à tête dans un restaurant huppé du comté.

La dramaturgie se met en place, les liens entre Jane Fairchild et son amant bien né Paul Sheringham sont anciens, et leurs retrouvailles étonnantes dans la chambre inondée de soleil du futur marié verront sans doute l’ultime épisode de leur liaison. A début du roman, nous découvrons Jane et son amant  au moment où celui-ci s’apprête à rejoindre Emma, sa future épouse. Il s’habille avec un soin tout particulier sans doute pour faire oublier son retard et laisse Jane profiter de la grande demeure vide de tout le personnel en ce dimanche à tout jamais différent.

Nous allons ainsi vivre les découvertes de Jane, la prise de conscience de sa condition en cette époque de l’entre-deux guerres où les chevaux cèdent le pas aux voitures, où la domesticité se réduit du fait de l’appauvrissement des revenus de ces grandes familles, où cependant les domestiques affinent leur jugement sur leurs maîtres et évoluent vers un affranchissement de leur condition. D’ailleurs à petites touches l’auteur nous amène à pressentir que l’avenir de Jane sera tout autre que celui que nous aurions pu imaginer au début du roman.

Une traduction au plus juste de à Marie-Odile Fortier-Masek, une écriture dont le rythme épouse les pérégrinations de l’héroïne, une suave étude des us et coutumes de cette époque charnière, tout concourt à faire de ce roman un petit bijou dont il serait dommage de se priver.

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